Le stress est probablement un des grands maux de notre époque et on entend énormément parler du cortisol comme étant l’ennemi à abattre. Bien qu’il est vrai que sa présence en trop grande quantité ait de nombreux effets négatifs, à la base, le cortisol est une hormone nécessaire et souhaitable. En effet, comme pour presque tout par rapport à la santé, le but n’est pas de complètement l’éliminer, mais plutôt de le balancer. Voyons donc en quoi le cortisol nous est utile, mais aussi quels impacts un débalancement pourrait provoquer et comment nous aider à mieux gérer cette hormone du stress.
Ce que fait le cortisol dans notre corps
Le cortisol est relié au concept d’allostasie, c’est-à-dire aux mécanismes par lesquels le corps modifie ses fonctions physiologiques pour conserver son homéostasie (équilibre) en réponse ou même en prévision d’un stress réel ou perçu. Par exemple, l’activité physique modérée à intense peut générer une libération d’adrénaline et de cortisol qui créera une hausse de la pression artérielle, c’est un mécanisme d'adaptation sain. Par contre, une hypertension artérielle constante qui serait due à un excès chronique de cortisol, c’est maintenant plutôt pathologique et non souhaitable.
Voici d’autres exemples des effets du cortisol dans le corps :
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Immunomodulation : Normalement, le cortisol joue un rôle dans le système immunitaire en réponse à l’inflammation pour aider à moduler la réponse immunitaire et contrôler l’inflammation. Par contre, en cas de stress chronique, le cortisol demeure toujours plus élevé et les cellules semblent s’y habituer, entraînant une résistance à son action. Cela affecte évidemment l’efficacité du système immunitaire et pourrait contribuer à l’état d’inflammation systémique de bas grade.¹
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Cycle circadien : Le taux de cortisol suit un cycle sur 24h qui participe à la régulation de notre cycle circadien avec l’aide de la mélatonine. Lorsqu’il est à son plus bas, la mélatonine sera à son plus haut, permettant le sommeil. Le matin, au moment du réveil, le cortisol sera à son plus haut et ce pic nous permet de bien nous réveiller et d'activer notre métabolisme. Toutefois, comme le cortisol commence à augmenter vers 2-3h du matin, s’il est déjà élevé dû à une période de stress ou encore un stress chronique, cela pourrait causer des réveils nocturnes en plus de nuire à la qualité du sommeil. Aussi, si le pic se produit au mauvais moment ou qu’il n’y a pas de pic au matin, cela pourrait être relié à une difficulté à se réveiller et à se sentir prêt à commencer la journée au réveil.²
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Fonctions métaboliques : Le cortisol agit par plusieurs mécanismes sur la santé métabolique. Il est connu pour augmenter la pression sanguine en entraînant une contraction des vaisseaux sanguins. 3 L’hypertension artérielle, un des critères diagnostiques du syndrome métabolique, a plusieurs effets néfastes reconnus sur la santé globale. Le cortisol agit également sur le pancréas et le foie pour augmenter la glycémie (entre autres via le glucagon) et contribue à la résistance à l’insuline. De ce fait, la glycémie augmentée entraînera par la suite une augmentation de l’insuline qui pousse le cellules à stocker l’excès de glucose, notamment en gras. Toutefois, le cortisol aura tendance à diriger ce stockage plutôt au niveau du gras viscéral que du gras sous-cutané. Ce gras viscéral qui entoure nos organes augmentera davantage l’inflammation de ceux-ci et contribuera à la libération de cytokines pro-inflammatoires, contribuant encore à l’état d’inflammation systémique de bas grade..⁴⁻⁵
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Système hormonal :Au départ, l'augmentation du cortisol est proportionnelle à l'augmentation des hormones thyroïdiennes puisque la thyroïde régule le métabolisme. Toutefois, le stress chronique lié au cortisol conduira à une modification au niveau de l’hypothalamus qui entraînera une diminution des hormones thyroïdiennes en plus de nuire à l’efficacité des hormones thyroïdiennes et à la sensibilité des cellules à celles-ci. Au niveau des hormones sexuelles, le cortisol pourrait diminuer la GnRH (gonadolibérine) en plus de perturber le métabolisme glucidique, ce qui affecte les niveaux des hormones sexuelles. Chez les femmes, il pourrait y avoir plus d’oestrogènes et de testostérone, qu’on peut relier entre autres au syndrome des ovaires polykystiques. Chez les hommes, il semblerait que ces perturbations entraînent plutôt une diminution de la testostérone, causant différentes problématiques telles que des troubles érectiles.⁶
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Neuroinflammation : Le cortisol est relié par plusieurs mécanismes à l’inflammation systémique, qui contribuera à son tour à la neuroinflammation. En effet, dû à l’état inflammatoire, il se produit une perturbation de la barrière hémato-encéphalique et une activation de la microglie, les cellules immunitaires du cerveau. Ces dernières vont ainsi libérer des cytokines inflammatoires, des chimiokines et des espèces réactives à l’oxygène, causant des dérèglements au niveau de la neurotransmission et de la neuroplasticité. La neuroinflammation, phénomène de plus en plus étudié, semble être reliée à plusieurs pathologies neurologiques, notamment, la dépression.⁷
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Humeur et mémoire : : Selon certaines études, le stress chronique causerait une atrophie de l’hippocampe et une augmentation du volume de l’amygdale, ce qui serait relié à la dépression, tout comme la neuroinflammation. De plus, ces changements au niveau du cerveau peuvent également être liés à des problèmes de mémoire, de concentration et d’apprentissage.⁸
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Intestin perméable et dysbiose : Le cortisol, et plus précisément la corticotrophine (hormone de libération du cortisol) affectent l'épithélium intestinal ainsi que le microbiote de plusieurs façons. La corticotrophine semble affaiblir les jonctions serrées entre les entérocytes, contribuant à ce qu’on appelle la perméabilité intestinale. Lorsque l’intégrité de l’épithélium intestinal est atteinte, de nombreux antigènes ou particules immunogènes peuvent traverser cette barrière et entraîner des réactions inflammatoires et une activation du système immunitaire grandement présent dans l’intestin. De plus, le stress chronique, qu’on associe à la libération de cortisol, est associé des perturbations au niveau de la couche de mucine (mucus protecteur de la muqueuse), du fonctionnement des mitochondries des cellules intestinales, de la composition du microbiote, du transit intestinal et plus encore. La santé intestinale occupe une place centrale dans la santé globale via différents axes. On relie la perméabilité intestinale et la dysbiose à de plus en plus de conditions de santé, pouvant toucher autant l’intestin que le reste du corps.⁹
Ce qui peut être fait pour aider à rééquilibrer le cortisol
Pour bien gérer le stress, il faut d’abord savoir le reconnaître. Le stress n’est pas uniquement émotionnel ; il peut être :
- PSYCHOLOGIQUE : émotions, maltraitance…
- PHYSIQUE : exercice (trop ou pas assez), blessure, manque de sommeil, chirurgie, manque d’oxygène, grossesse…
- BIOLOGIQUE : infections (virus, bactéries, levures, parasites)...
- ENVIRONNEMENTAL : température extrême, champs électromagnétique, bruit, soleil/rayons UV, changement de pression atmosphérique, altitude, radiation…
- NUTRITIONNEL : carences, sucre (pro-inflammatoire), variation de glycémie importante, alcool, intolérances/allergies, fritures et gras trans (pro-inflammatoires)...
- CHIMIQUE : pesticides, additifs alimentaires, métaux lourds, PFAS, médicaments, plastiques, fragrances, fumée, poussière…
Évidemment, certains stress aigus sont reconnus pour être bénéfiques et stimuler le corps à s’adapter et augmenter sa résilience. Le but n’est donc pas de complètement éliminer le stress de notre vie et de rester dans le confort et la sécurité en tout temps. Au contraire, la recherche de confort, c’est le vieillissement selon certains spécialistes en longévité. Donc, bien que se donner des défis et sortir de notre zone de confort puisse, en effet, nous faire vivre ce qu’on appelle un stress aigu, le corps est normalement bien équipé pour y faire face. Le problème, c’est lorsque le stress devient chronique. C’est pourquoi il peut être pertinent d’identifier les stresseurs auxquels nous sommes confrontés et tenter d’éliminer ceux qui ne nous apportent pas de bénéfices. L’adoption de différentes techniques et habitudes de vie peuvent également favoriser une meilleure gestion du stress. En voici quelques-unes :
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Respiration abdominale : Le nerf vague, impliqué dans le système nerveux autonome, est activé par la respiration abdominale ou diaphragmatique. L’inspiration serait plus activatrice du système nerveux sympathique («fight or flight») tandis que l’expiration activerait davantage le système nerveux parasympathique («rest and digest»). Pour cette raison, lorsque nous tentons de retrouver un état de relaxation, il est préconisé d’adopter une respiration ayant une plus longue expiration que l’inspiration. Cette technique a fait ses preuves dans de nombreuses études et une façon d’évaluer l’état du système nerveux autonome est avec la mesure de la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC). Dans une étude, une seule séance de 5 minutes de respiration ayant 4 secondes d’inspiration et 6 secondes d’expiration a été efficace chez les participants de tous âges pour obtenir une meilleure VFC et un sentiment d’anxiété réduit.¹⁰
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L’utilisation d’huiles essentielles calmantes comme la lavande, la camomille, la bergamote ou le néroli, entre autres, a été démontrée comme étant efficace pour réduire le sentiment de stress et l'anxiété. Celles-ci contiennent différentes molécules capables de venir agir sur certains mécanismes comme la régulation du GABA, neurotransmetteur calmant.¹¹
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Les plantes adaptogènes sont de plus en plus étudiées et leurs effets entre autres sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien sont bien reconnus et même démontrés scientifiquement. Elles agissent entre autres en augmentant la phase de résistance au stress et aident à atteindre un état d’adaptation plutôt qu’un état d’épuisement. Elles permettent donc une plus grande résilience au quotidien et fournissent de meilleures réserves pour faire face aux différents stresseurs.¹²
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Thérapie cognitivo-comportementale : La ligne est souvent mince entre l’excitation ou la fébrilité et le stress ou l’anxiété. En fait, ce sont des processus physiologiques semblables, mais qui n’ont pas la même émotion associée. Donc, prendre le temps d’analyser la situation pour voir quelle émotion est la plus juste. Par exemple, il peut être normal de ressentir de l’anxiété face à un entretien d’embauche. Toutefois, cela peut aussi être perçu comme excitant ou comme un défi à relever qui vous rendra fier. De plus, il semblerait que le fait de répéter à haute voix qu’il s’agit d’excitation et non d’anxiété peut aider à se convaincre. 13 Le stress est souvent une question de perception selon les principes de la thérapie cognitivo-comportementale, donc nos pensées sont très importantes et les thérapeutes sont les mieux placés pour vous accompagner dans cette gestion si l’anxiété prend trop de place dans votre quotidien.¹³
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Ralentir, prendre le temps de se reposer et pourquoi pas aussi de pratiquer des activités de relaxation ou de pleine conscience.
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Prendre soin de soi, apprendre à se prioriser et respecter nos limites.
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Mettre en place des techniques pour améliorer la qualité du sommeil (voir l’article Qui dort bien, vit bien).
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S’exposer à la lumière du soleil dès le début de la journée pour favoriser le pic de cortisol qui nous aide à nous réveiller et balancer le cycle circadien.¹⁴ Également, les rayons du soleil en été permettent de profiter des bienfaits de la vitamine D et de l’oxyde nitrique qui sont produits lors d’une exposition de la peau, sans brûler bien évidemment.
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Respirer un bon air, exempt le plus possible de polluants.
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Choisir de bons aliments et de bons breuvages, les moins transformés possible et pourquoi ne pas inclure des aliments riches en tryptophanes (précurseur de la sérotonine) et en magnésium (minéral reconnu pour la relaxation).
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Prendre soin de notre microbiote : inclure des aliments riches en fibres, prébiotiques et des aliments fermentés, probiotiques.
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Lorsqu’on sent une montée d’adrénaline, on peut aussi se servir de toute cette énergie pour faire de l’activité physique par exemple. L'activité physique est une très bonne technique pour augmenter notre résilience au stress.
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Limiter notre exposition aux médias qui peuvent avoir recours au sensationnalisme pour susciter de plus grandes réactions
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Limiter l’utilisation du cellulaire et peut-être même le mettre en noir et blanc pour limiter l’hyperstimulation. Il peut être bon de le garder le plus souvent hors de portée pour éviter la réaction de FOMO (acronyme tiré de l’anglais qu’on peut traduire par la peur de manquer quelque chose), qui nous met toujours aux aguets, dans un état d'hypervigilance.
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Passer du temps avec les gens qu'on aime et qui nous font du bien. Le rire libère des endorphines et abaisse le cortisol
Comme vous aurez pu le constater, le cortisol a bel et bien sa place, tout comme le stress et l’anxiété qui nous poussent à nous dépasser, nous adapter et nous améliorer. L’important, c’est de réussir à trouver l’équilibre !
Références
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