Beaucoup de gens, souvent angoissés, se demandent : Qu’est-ce bien manger ?
La réponse est simple : avant tout, il faut suffisamment de calories. Je vous vois froncer les sourcils. N’est-ce pas ce que tout le monde aujourd’hui veut à tout prix éviter ? Attention ! Dans un régime occidental « normal », les calories sont d’affreux fantômes. Vu sa richesse en aliments transformés chargés de sucre et de graisses et dépourvus de fibres, ce régime -- aussi nommé urbain/industriel – comporte facilement, rapidement, sans même qu’on s’en aperçoive, une surcharge en calories qui seront difficiles à brûler et qui feront grossir.
Mais… un régime équilibré paysan/agricole est riche en aliments fibreux, des aliments qui sont vite bourratifs et alors, il est tout aussi facile de s’arrêter de manger avant que l’apport en calories ait été satisfait, qu’il est difficile dans le régime urbain/industriel de ne pas continuer à manger alors que l’apport en calories est satisfait depuis longtemps.
Vous comprenez le problème ? Le passage d’un régime urbain/industriel où l’on a pendant des années trop mangé, à un régime équilibré où il faut manger – mastiquer -- pour vivre, se fait très mal si l’on conserve la hantise des calories1.
On entend souvent dire que la qualité est préférable à la quantité. Ça dépend. Beaucoup de personnes soucieuses de leur santé se mettent à rechercher avec soin les meilleurs aliments possibles, qu’elles achètent souvent à prix fort, et qu’elles grignotent en petites quantités. Leur démarche est louable mais erronée. Elles croient sincèrement que dans la petite quantité ingérée, à cause de sa qualité exceptionnelle, il y autant, sinon plus, que dans les aliments de moindre qualité consommés en plus grande quantité.
Je vous en prie, retenez-le bien et ne l’oubliez jamais : sans quantité – sans suffisamment de calories, et il en faut au minimum 1700 par jour -- il n’y a pas de qualité possible en nutrition. La carence en calories, c’est-à-dire l’insuffisance de quantité, est de toutes les carences, la plus fondamentale, la plus grave. C’est la carence première, celle qui entraîne toutes les autres. Ne pas fournir la quantité de nourriture nécessaire à la production d’énergie d’un individu, c’est obligatoirement lui refuser la qualité de vie qu’il recherche. Or plusieurs philosophies alimentaires populaires sont à risque d’entraîner une carence en calories : on préconise trop de crudités et trop de jus de légumes feuillus – ces choix sont tous pauvres en calories -- et pas assez d’hydrates de carbone complexes – si on ne les condamne pas carrément.
En l’absence d’une source alimentaire adéquate d’hydrates de carbone complexes – soit de pain, de pâtes, de céréales complètes, de pommes de terre en abondance qui sont les sources fondamentales d’un glucose de qualité -- le corps va être obligé de transformer les protéines en glucose. Et nous voilà sur la pente des carences en chaîne. La transformation des protéines en glucose ne fournit pas la quantité de glucose nécessaire au bon fonctionnement du cerveau et nous voilà les deux pieds dans l’enfer de l’hypoglycémie3. Mais il y a plus. Les protéines transformées en glucose ne peuvent plus servir à la construction du corps, à l’élaboration des sécrétions et des liquides corporels : enzymes, hormones, spermatozoïdes et sperme, anticorps.
Bientôt apparaissent les signes d’une malnutrition calorique, puis automatiquement en protéines, et finalement en graisses aussi, car en cas de famine – les régimes à moins de 1000 calories par jour -- le corps transforme 10% des graisses en glucose, ce qui produit 90% de déchets sous forme de corps cétoniques toxiques pour le cerveau. Et bien sûr, des graisses transformées et gaspillées ne peuvent plus servir à produire suffisamment de chaleur corporelle, élaborer et conserver les vitamines liposolubles (A,D, E, K), et entretenir la bonne myélinisation des neurones.(Pour une explication plus détaillée de ce triste phénomène, voir mon livre LA SANTÉ TOTALE2,le chapitre « La nutrition optimale ».)
Quels sont, entre autres, les signes d’une malnutrition calorique ? Fatigue, œdèmes (yeux, mains, pieds enflés), arrêt de croissance chez les enfants, amaigrissement avec frilosité, perte de cheveux, infections à répétition, troubles nerveux et mentaux (anxiété, dépression), etc.
Tout cela, on cherchera à le combattre avec des pilules, suppléments, concoctions et thérapies miracles ! Quand la solution première n’est pas plus loin ni plus coûteuse que du pain complet, des pâtes alimentaires complètes, des pommes de terre en robe des champs, le tout bien préparé et mangé à satiété !
Les enfants sont particulièrement à risque d’une carence en calories dans un régime qui mise sur la qualité des crudités ou des jus pris en tête de repas ou entre les repas. Ceux-ci coupent l’appétit avant que le plein en calories ne soit fait. Les enfants de 2 à 12 ans peuvent alors souffrir de maigreur, d’infections à répétition (rhume, otite, bronchite), de nervosité, d’insomnie, d’agressivité. Deux à trois tranches de bon pain à chaque repas pourraient faire toute la différence4.
Ainsi, la règle fondamentale d’une bonne nutrition, c’est qu’il faut manger ! Oui, manger et non grignoter, et non jeûner. Et ce qu’il faut manger plus que le reste, ce sont des céréales complètes variées sous toutes leurs formes traditionnelles. Blé, épeautre, blé khorasan, orge, avoine, riz, millet, sarrasin, quinoa, maïs, seigle, etc., sont le meilleur combustible de notre corps. Les céréales entières, non raffinées donnent le plus haut rendement nutritionnel, de la façon la plus pure et non polluante pour notre écologie interne. Aujourd’hui, comme depuis toujours, il faut manger pour vivre. Chaque jour, vive notre pain quotidien ! Danièle Starenkyj© 2016 www.publicationsorion.com
1. Colmant É., Starenkyj D., ENFIN MINCE, Orion, 2010.
2. Starenkyj D., LA SANTÉ TOTALE, Orion, 2009.
3. Starenkyj D., LE MAL DU SUCRE, Orion, 2011.
4. Position paper of the American Dietetic Association : Vegetarian Diets, J A DIET ASS, Vol. 97, No 11, novembre 1997.